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Cérémonie de Liebvillers du 19 août 2023, 11 h.

Une nouvelle fois cette année, se déroulait devant le Monument aux morts de Liebvillers, la traditionnelle Cérémonie à la mémoire des événements survenus le 19 août 1944, en ces lieux même, aux premières heures de l'épopée du Maquis du Lomont, lieu de résistance notoire dont les contours ont fait de cette petite localité, un de ses points de passage obligés.

Il y a soixante-dix-neuf ans, le quotidien de ce charmant village d'environ cent-cinquante habitants, accroché sur un contrefort du Lomont, à l'aplomb de la route départementale qui longe le Doubs, entre Pont-de Roide et Saint-Hippolyte, était frappé par de tragiques événements historiques, qui imprimeront dans la pensée collective locale, un devoir de mémoire inébranlable et intergénérationnel. En ce samedi 19 août 2023 caniculaire, nous étions vraiment très nombreux à nous réunir sur cette place du "19 août 1944", pour nous recueillir et rendre hommage à ces courageux citoyens patriotes, premières victimes d'un Maquis du Lomont naissant, qui ont perdu la vie prématurément dans un combat inégal contre l'occupant nazi, pour libérer notre territoire.

Avant de débuter la commémoration, le Maître de cérémonie, le lieutenant-colonel (er) Guy Baguerey, avait procédé au placement des participants selon les règles protocolaires avec une disposition appropriée à la configuration du site. Le monument est élevé au centre d'un terre-plein.

A la droite du monument, au côté du lieutenant-colonel (er) Baguerey et de Marcel Anthoine, respectivement Président et Vice-Président de l'association Mémoire et Souvenir de la Résistance du Pays de Montbéliard et du Lomont, s'étaient rassemblés : Catherine Racine, Maire de Liebvillers ; Sylvie Siffermann, Sous-préfète de Montbéliard ; Jean-François Longeot, Sénateur du Doubs ; Christine Bouquin, Présidente du Département ; le lieutenant-colonel Damien Mathieu, commandant en second le groupement de gendarmerie départementale du Doubs ; Franck Villemain, le Président de la communauté de communes du Pays de Maîche.

A l'arrière du monument, à côté du Mât des Couleurs, avaient été disposés les quatre Porte-Drapeaux, dont deux étaient assurés par des dames de l'association MSRPML.

La gauche du monument accueillait des élus : Christian Méthot, Conseiller Général et maire de Meslières ; des maires et conseillers municipaux avec en particulier cinq maires en écharpe : Roland Martin de Charquemont ; Régis Ligier de Maiche ; Léon Bonvallot de Montécheroux, Jean Paul Clément de Valoreille; André Bessot de Fleurey. Le chef d'escadron commandant la compagnie de gendarmerie départementale Cédric Nestor-Romain, fermait le troisième côté du carré, en se tenant auprès du Président de la Vigilante d'Audincourt Christophe Decraene, venu assurer les parties musicales.

Une assemblée très recueillie, constituée de membres des familles de résistants Morts pour la France, de représentants d'associations patriotiques et de nombreux habitants du secteur, s'était regroupée au pied du terre-plein.

La cérémonie pouvait débuter. Le lieutenant-colonel (er) Baguerey commanda la montée des couleurs, assurée avec précision par la Sergent Patois de l'Armée de l'Air en tenue de combat impeccable et calot d'armes.

Puis vint la prise de parole de Mme Catherine Racine, Maire de Liebvillers :

« Madame la Sous-Préfète ; Monsieur le Sénateur ; Madame la Présidente du Département ; Monsieur le Lieutenant-colonel commandant adjoint de la gendarmerie de Besancon ; Mesdames et Messieurs en vos titres grades, charges fonctions et qualités ; Chers amis, Un grand merci pour votre présence aujourd’hui. Depuis le 19 août 1994, date de la 1ère cérémonie du Souvenir à Liebvillers, ce rendez-vous sur cette place, est incontournable. Les faits de résistance ne peuvent pas tous être relatés dans des livres d’histoire, certains restent méconnus et s’enfoncent dans l’oubli des mémoires. Dans nos villages, nous devons continuer à nous souvenir de ces femmes et de ces hommes, quelques fois très jeunes, venant de tous les horizons politiques, philosophiques s’engageant dans des missions périlleuses pour défendre la liberté et leur patrie. Ils deviendront des Résistants de l’ombre. La lutte, âpre et sanglante, sera longue …

Le 19 août 1944 à Liebvillers est un de ces faits dont nous devons nous souvenir. En voici le récit. A partir du 6 juin 1944, les maquis s’organisent en France, dans notre secteur : le maquis d’Ecot et le maquis du Lomont. Le maquis d’Ecot est en parti décimé le 8 juillet 44. De nombreux actes de résistance ont alors lieu entre le 8 juillet et le 17 aout 44. Durant le mois d’aout 44, le Maquis du Lomont se met en place, il comptera jusqu’à 3200 hommes et femmes. Sa vocation étant de servir de tête de pont pour les combats de la libération. Entre le 15 et le 19 août 44 : Des résistants et des FFI de toute la région montent au Lomont, sur le plateau de Montécheroux et dans les forêts de Liebvillers. La montée se fait individuellement ou par groupe, de jour comme de nuit. Parmi ces hommes, se retrouvent des rescapés du maquis d’Ecot qui s’installent dans les bois de Liebvillers. Tandis que des groupes de Bart et de Sochaux se regroupent dans la combe, à la sortie de Noirefontaine et montent au « Roulet » près de Montécheroux y établir leur camp. Ils ne disposent que d’une mitraillette et de deux grenades.

Le 19 août au matin : Une patrouille descend à Liebvillers en reconnaissance afin de s’assurer que ses habitants sont disposés à fournir eau et ravitaillement. Dans l’après-midi du 19 août, deux groupes de volontaires se constituent : La corvée d’eau : chargée du ravitaillement, et la corvée d’armes : chargée de récupérer des armes parachutées par avion au fort du Lomont. Mais Entretemps, alerté par les nombreux va et vient dans le secteur, les Allemands sont arrivés à Liebvillers et ont pris deux otages (Anatole Girardot, l’Adjoint au Maire et Samuel Beaudroit, l’Instituteur). Ceux de la corvée d’eau composée de six hommes, tous originaires de Dung, débouchent, confiants et sans armes, en bas de la charrière au lieu-dit « le Vivier » à quelques mètres d’ici. Marcel Clerget, Fritz Eiseli, Julien Fichot, Georges Grosclaude, Alphonse Thierry, Gaston Tournoux se retrouvent prisonniers et ligotés sur un camion réquisitionné par l’occupant, en plein soleil, au centre du village. Bravant les interdictions des Allemands et n’écoutant que son cœur, Henriette Racine, jeune femme du village, leur apporte de l’eau.

Guidé par un des prisonniers, les allemands montent au « roulet » et tombent sur la corvée d’armes. Une fusillade éclate : Pierre Tissot est le premier tué du Lomont. Jacques Charpiot, Paul Montagnon, Jacques Oudon sont fait prisonniers. Témoin de cette attaque, Alexis Rose, jeune homme du village est contraint d’enterrer Pierre Tissot. Les 9 prisonniers sont embarqués en direction de Belfort pour y être interrogés, 7 ne reviendront pas. En chemin, à Nadam, 5 résistants échappés de la fusillade sont à leur tour arrêtés ; à Noirefontaine, un autre groupe de résistants est pris à partie, 1 est tué et 6 sont prisonniers. Au total pour cette seule journée du 19 août 44, 2 résistants sont tués, 20 sont prisonniers et envoyés dans des camps de concentration, 8 n’en reviendront pas.

Aujourd’hui plus qu’hier nous ne devons pas oublier les horreurs des guerres. N’avons-nous pas le devoir de continuer à nous souvenir du courage de ces femmes et de ces hommes de l’ombre, qui ont permis à la France d’être et de rester un pays libre. Grossman avait eu ces paroles : "L’aspiration, de la nature humaine vers la liberté est invincible, elle peut être écrasée mais elle ne peut être anéantie…" Dans ce monde chaotique ou tant de feux de violence s’allument, je fais le vœu que les générations futures pensent et vivent avec les symboles de Paix et de Liberté dans leur cœur. Merci de votre attention. »

Le lieutenant-colonel (er) Baguerey, Maître de cérémonie, enchaina par un rappel historique : « Après le brillant exposé de Mme Racine Maire de Liebvillers sur les événements du village le 19 août 1944 et son hommage à la résistance, je me permets de revenir sur les actions menées par la 4ème compagnie du Maquis du Lomont évoquée précédemment.

Je vais en citer quelques unes : le contrôle permanent de l'axe Pont-de-Roide, Charquemont, Maîche ; le combat victorieux du 22 août 1944 sur les pentes du village ; l'embuscade du Pozet le 29 août 1944 avec deux blessés ; l'attaque de la patrouille allemande composée de deux camions légers transportant une dizaine d'Allemands le 1er septembre 1944 matin, où le directeur de l'usine électrique du Refrain et son chauffeur sont tués ; l'attaque du 1er septembre au soir sur le convoi de repli des Allemands du Haut-Doubs formé par les deux camions du matin, des chevaux, des attelages, des chariots, des cyclistes et des piétons ; les 7 et 8 septembre 1944 sur Glay la poursuite des Allemands en appui du 3ème RTA de la compagnie Bahisson ; l'encerclement des tirailleurs et maquisards par la contre-attaque allemande et le passage en Suisse pour regagner le Lomont. »

Au terme de son intervention, le lieutenant-colonel (er) Baguerey lança le cérémonial aux Morts. Tout d'abord, avec un dépôt des gerbes au pied du monument, une composition florale présentée par des membres des familles de déportés, notamment Claude Montagnon fils de Paul capturé lors de cette journée tragique ; puis la gerbe de la municipalité par Mme Catherine Racine accompagnée de Louise une enfant du village ; suivi celle du Département du Doubs par Mme Christine Bouquin et Mr Christian Méthot ; et pour terminer celle de Mme la Sous-Préfète Sylvie Siffermann.

L'hommage aux Morts se poursuivait avec la Minute de silence, suivi de la Marseillaise.

Mme la Sous-Préfète prit ensuite la parole :

« Elus, Madame le maire, Mon colonel, Mesdames et messieurs les représentants des associations patriotiques et de mémoire, Mesdames et Messieurs, Madame le Maire, Je tiens à vous remercier pour cette invitation, et pour l’organisation de cette cérémonie.

Le département du Doubs, et plus particulièrement aujourd’hui le nord du Doubs, est en effet une terre riche d’histoire, de Résistance, mais elle est également riche de Transmission. Depuis mon arrivée dans l’arrondissement, je ne cesse d’être impressionnée par la capacité des Doubiens à la transmettre, à la faire vivre, comme aujourd’hui, par cette ferveur, cette capacité à mobiliser, impressionnée par le dynamisme des associations du monde combattant et de Mémoire, dont je salue les membres, impressionnée par la présence toujours nombreuse des associations et de leurs fidèles porte-drapeaux, qui portent le flambeau de la Mémoire, et le transmettent.

Cette cérémonie est pour moi, et pour d’autres j’en suis persuadée, l’occasion d’approfondir notre connaissance de l’Histoire locale, l’histoire du maquis du Lomont, qui comptera jusqu’à 3 200 hommes et femmes pour ces combats de la libération. Liebvillers commémore aujourd’hui les faits historiques et les combats pour la Libération qui se sont déroulés entre le 15 et le 19 août 1944. Des résistants et des FFi de toute la région sont montés au Lomont, dans les forêts de Liebvillers, et notamment parmi eux des rescapés du maquis d’Ecot. Les habitants de Liebvillers ont participé activement aux combats pendant lesquels, entre autres, 6 otages ont été attachés en plein soleil. N’écoutant que son courage, Henriette Racine leur apportera de l’eau, au risque de perdre la vie. Dans ces combats de nombreux hommes seront tués ou déportés à Ravensbruck, où, pour la plupart, ils mourront. Et si nous commémorons ainsi un bien triste anniversaire, une tragédie, nous portons ensemble, par notre présence ici aujourd’hui un message fort, et une histoire dont nous sommes fiers. Nous portons le message de ceux qui se sont dressés contre le nazisme, contre son fanatisme, contre cette idéologie violente, totalitaire, exclusive, raciste et antisémite. Il nous faut porter les valeurs de la Résistance, de respect, d’ouverture, de lutte contre l’obscurantisme, les valeurs de Liberté, d’Egalité, et de Fraternité, ces valeurs qui font notre République, et qui doivent, aujourd’hui plus que jamais, être portées et défendues. Je vous remercie. »

Après cette allocution très appréciée, en mémoire des vaillants résistants, le lieutenant-colonel (er) Baguerey entonnait avec la musique et le public : "Le chant des Partisans", avant d'inviter les autorités et les personnes qui le souhaitaient, à venir remercier les Porte-drapeaux.

Mme Racine prenait la parole pour clore la cérémonie et exprimer ses remerciements à toutes les personnes présentes, acteurs et spectateurs, qui ont permis le déroulement de cette très belle cérémonie. Le verre de l'amitié était offert par la municipalité. Il complétait parfaitement ce moment de contacts "mémoire" avec la population et la jeunesse.

Bravo à la municipalité de Liebvillers pour ce beau moment de recueillement en souvenir de ceux qui ont offert leurs vies pour notre liberté.

Date de dernière mise à jour : 19/09/2023